[Lune 1/2] Des années calmes?
Notre satellite naturel n’a pas été visité à pied depuis plus de quarante ans, mais a été au centre d’un grand nombre d’initiatives de la dernière décennie, notamment de la part des entreprises privées, mais aussi de la Chine, du Japon ou de la Russie. Malheureusement, le temps passe et les initiatives sont repoussées d’autant… A tel point qu’il est parfois difficile de s’y retrouver entre annonces et réalité. On fête en ce mois d’avril les 45 ans du fantastique échec de la mission Apollo 13, qui avait su captiver les foules… Aujourd’hui et demains, réalisons un petit tour d’horizon des projets les plus « chauds » concernant la Lune, avec un premier zoom sur l’exploration, qui sera suivi demain d’un point sur la recherche.
Lors de la dernière mission Apollo, Gene Cernan et Harrison Schmitt ont fait de nombreux tours de roue… Depuis, à part quelques rovers et autres crash, c’est plutôt calme!
Crédit NASA.
Le X-Prize : dernières lignes droites
Le Google Lunar X-Prize (voir ici) se termine officiellement au 31 décembre 2016: après les nominations des prix « Milestones » en février, nous sommes dans la dernière ligne droite. En effet, il ne faut pas s’y prendre trop tard pour penser à emmener son rover sur la Lune! Les fusées ne sont pas légion, et il faut plus d’un an pour réserver, intégrer, prévoir le vol… Des services qui ne sont pas gratuits. Seuls deux concurrents se sont pour l’instant alliés pour réserver le vol d’une fusée Falcon 9 de SpaceX. Il s’agit d’Astrobotic (USA) et de l’équipe japonaise Team Hakuto. Mariage de raison, afin de faire des économies nécessaires pour se rendre sur la Lune. Le défi n’en sera que plus passionnant, avec les deux concurrents démarrant en même temps du site d’atterrissage pour parcourir 500 mètres, le tout en direct et en vidéo.
Les rovers de Team Hakuto (gauche) et Astrobotic (droite) feront si tout va bien, rien de moins qu’un 500m départ arrêté, sur la Lune!
Crédit GLXP
Toutefois, les autres concurrents, même s’ils n’ont pas pour l’instant annoncé de vol, progressent régulièrement. C’est le cas de Moon Express, qui continue les essais de son espèce de petite « puce lunaire », laquelle ne roule pas mais se spécialise dans les survols à petite ou moyenne altitude. Leur système permet d’ailleurs de partir à moindre coût, puisque le robot de Moon Express peut quitter l’attraction terrestre à partir d’une injection sur une trajectoire d’orbite géostationnaire. Egalement, l’équipe indienne de la compétition (décorée aux Milestones) a reçu ces dernières semaines le soutien de nombreux particuliers et de l’ISRO, l’agence spatiale indienne, même si cette dernière est tenue par un plafond d’aide (le prix s’adresse à des initiatives non étatiques).
Compte tenu du calendrier actuel, ces vols éventuels seront jusqu’à plus ample informé la prochaine mission lunaire lancée depuis notre planète. Toutes les autres échéances sont plus lointaines.
Moon Expressn n’a pas encore dit son dernier mot!
Crédit Paul Spudis
L’occident et la Russie, des projets, mais…
Le temps passe, les discours eux, ne changent pas. Les Etats-Unis sont très intéressés par la Lune, mais la politique spatiale fixée par l’administration Obama n’en fait qu’une lointaine priorité: il serait même question de laisser tomber après 2016 le Lunar Reconnaissance Orbiter (LRO), qui est la sonde en orbite autour de la Lune capable encore aujourd’hui d’en produire les meilleurs clichés. L’ESA, de son côté, tente d’établir des coopérations, mais notre satellite naturel n’est pas dans les plans immédiats, au contraire de Mars pour l’instant. Quant à la Russie, la nation a plusieurs fois fermement indiqué que la Lune serait son prochain pas vers l’espace hors de l’orbite terrestre, mais les années passent sans qu’un plan concret puisse voir le jour. La Russie n’a pas de lanceur adéquat, ni de sonde sur les rails pour paver la voie à une mission vers la Lune.
La mission russe Luna-Glob est actuellement prévue pour 2018, mais elle est activement annoncée depuis le milieu des années 1990, donc il ne faut pas trop s’avancer.
Crédit Lavochkin/Skyrocket.de
L’Asie fait la course à la Lune
Le continent Asiatique, au sens large, est pour sa part en pleine course lunaire. Le Japon travaille régulièrement sur des couples orbiteur/atterrisseur pour donner suite à la mission SELENE lancée en 2007, et la Corée, malgré sa faible expérience, a plusieurs plans arrivant à maturité et prévus pour 2020. Les deux concurrents les plus avancés sont la Chine et l’Inde. L’agence indienne, forte du succès de sa mission Chandrayaan-1 en 2008, a prévu un couple orbiteur/rover à roues, qui devrait se poser sur notre satellite en 2017 (ou 2018). La mission, très ambitieuse, est vue comme une priorité. Il faut dire que le principal concurrent est très actif: la Chine a déjà réussi 4 missions lunaires dans les dix dernières années, elle a encore un orbiteur et le couple atterrisseur/rover Yutu est encore en activité. La Chine a d’ailleurs terminé ses tests pour la rencontre et le docking en orbite autour de la Lune au début de cette année avec son orbiteur Chang’e 5 TI.
Le Japon aimerait bien augmenter les résultats que la nation avait obtenu avec sa mission SELENE, en s’approchant, cette fois, de la surface… Crédit JAXA.
Pour autant, il semble que les équipes chinoises aient eu des soucis de budget. Alors qu’un autre rover est prêt sur Terre (Chang’e 4), ce dernier ne sera pas envoyé avant 2018, et il n’est finalement pas certain que ce soit sur la Lune. Et puis, l’agence chinoise a demandé aux laboratoires internationaux de présenter leurs instruments pour plus d’exploration… Si la démarche est louable, cela prouve que les travaux ne sont pas aussi avancés que prévu. Cependant, la mission prioritaire est Chang’e 5, toujours prévue pour novembre 2017: orbite, descente lunaire, prise d’échantillons et retour vers la Terre, rien de moins! Si elle réussit, la Chine marquera un événement au moins aussi significatif que l’atterrissage d’acteurs privés avec le X-Prize.
La mission Chang’e 5 promet d’être l’une des explorations spatiales les plus importantes de la Lune pour la décennie. Crédit CCTV/Spaceflightnow
Demain, nous verrons que si 2015 et 2016 sont des « années calmes » pour la Lune, les chercheurs ne sont pas en période de repos: les résultats affluent sur l’étude de notre caillou orbital! Entre temps, ne désespérez pas. L’homme ne posera pas le pied sur la Lune avant les 50 ans d’Apollo, mais il y a de bonnes chances que les dix prochaines années voient plus que des rovers arriver sur le régolite blanc…
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