[67p] Réveil du robot Philae sur la comète!
Sept mois de sommeil! Depuis le 15 novembre, les scientifiques de l’agence européenne (ESA) et surtout l’équipe française en charge de Philae tentent de reprendre contact avec le petit robot. Souvenez-vous, celui qui avait écrit l’histoire en se posant avec succès sur la surface chaotique de la comète 67p Churyumov-Gerasimenko! Eh bien figurez-vous que le robot se porte bien, que son signal est apparemment stable, et qu’il a échangé plus de 85 secondes de données avec les équipes au sol via la transmission de la sonde Rosetta qui orbite la comète. C’est une grande première, car un tel revirement de situation ne s’est jamais présenté! Si tout se passe bien, les expériences scientifiques pourront reprendre d’ici quelques jours entre Philae et Rosetta! Mais ce n’est pas la seule nouvelle concernant Philae cette semaine, car depuis mercredi circule une série de clichés: le petit robot est probablement localisé.
Philae, pris par la sonde Rosetta alors qu’il s’éloignait vers la surface de la comète 67P
Crédit ESA/Rosetta/MPS for OSIRIS Team MPS/UPD/LAM/IAA/SSO/INTA/UPM/DASP/IDA
Retrouver Philae
Dès qu’on a su que le petit atterrisseur avait rebondi et ne s’était pas arrimé sur le sol au site prévu pour qu’il se pose, la chasse au robot Philae était ouverte! Déterminer sa position et son orientation sont deux paramètres importants pour savoir quand Philae peut se réveiller, à quel moment transférer des données et quelle est la trajectoire optimale pour les recevoir (Philae et la sonde Rosetta ont besoin d’être « en visu » pour communiquer). Pour ce qui était de l’ensoleillement, les équipes ont vite compris que ce n’était pas terrible, les batteries ne se chargeant pas assez vite pour compenser les mesures des instruments scientifiques. Pour autant, déterminer la position du robot est devenue encore plus importante après la perte de contact du 15 novembre car intrinsèquement, Philae était en bonne santé. Mieux, le noyau de la comète 67P a une rotation qui n’est pas dans l’axe du soleil, ce qui créé des saisons, et finalement permet d’ensoleiller des zones différentes avec des angles incidents plus intéressants pour Philae: la période actuelle était déjà identifiée comme la plus intéressante pour un réveil du petit atterrisseur.
Officiellement, il y a encore quelques candidats pour la présence de Philae à la surface de la comète, cerclés de rouge sur la photo. Toutefois, celui en haut à gauche tient largement la tête.
Credits: Centre image: ESA/Rosetta/NAVCAM – CC BY-SA IGO 3.0; insets: ESA/Rosetta/MPS for OSIRIS Team MPS/UPD/LAM/IAA/SSO/INTA/UPM/DASP/IDA
Grâce aux mesures de ses instruments scientifiques, entre autre le radar et le détecteur de champ magnétique, en plus des quelques images prises par la caméra CIVA présente sur Philae, on connait depuis décembre une zone elliptique au sein de laquelle se trouve le petit robot… Coup de théâtre cette semaine, une nouvelle étude publiée par Philippe Lamy montre un site juste en dehors de l’ellipse considérée jusqu’ici… avec une caractéristique très intéressante: sur une photo lors d’un passage à basse altitude le 22 octobre, il n’y a que des roches. Hors, sur deux passages successifs les 12 et 13 décembre, il y a un définitivement un reflet sur les images! Les chercheurs en ont profité pour faire des simulations d’exposition au soleil, et cela pourrait bien être concluant. La réponse définitive sera sans doute apportée dans les jours à venir si la communication entre Rosetta et Philae perdure: entre les images et les données radar, il n’y aura plus de doutes.
Les photos de décembre ne sont pas aussi résolues, car la sonde Rosetta qui prenait les photos était à environ 20km d’altitude contre 10 en octobre. Toutefois, on voit clairement un point brillant qui n’était pas présent avant l’atterrissage de Philae…
Credits: ESA/Rosetta/MPS for OSIRIS Team MPS/UPD/LAM/IAA/SSO/INTA/UPM/DASP/IDA
Le réveil
Nous en avons parlé dans notre dernier article (voir ici), la sonde Rosetta exécute depuis trois mois des périodes d’écoute pour tenter de capter les signaux de Philae. Hier, le 23 juin, la communication a été initialisée, et les chercheurs au sol ont pu récupérer 300 paquets de données. Au sein de ces derniers, télémétrie, température, données d’alimentation, et sans doute un set d’expériences (le robot est programmé pour exécuter ses tâches dans l’ordre tout seul), on ne sait pas encore. En tout cas, il fait -35 degrés à la surface, et Philae dispose de 24 watts de puissance… Il en fallait 19 pour que le robot puisse se réveiller et se signaler! Au-delà de l’extraordinaire bonne nouvelle, il y a beaucoup de travail à venir. Déjà, il va falloir plusieurs jours pour « vider la mémoire » du petit atterrisseur: ce dernier s’est réveillé plusieurs fois depuis novembre, et il a accumulé 8000 paquets de données… Sa mémoire est saturée mais ce n’est pas grave, toutes les 10 heures environ Rosetta peut télécharger ces données et les renvoyer vers la Terre.
La comète 67P Churyumov Gerasimenko est très active en ce moment, et Rosetta ne peut pas trop s’en approcher. Les dernières images ont été prises à un peu moins de 200km de distance.
Crédit ESA/Rosetta/NAVCAM
Cela ne veut pas forcément dire que les données vont affluer comme s’il en pleuvait, malheureusement. Il ne faut pas oublier que dans deux mois, la comète 67P arrive à son périgée, le point le plus proche du soleil de son orbite. Et en ce moment, elle dégaze beaucoup, créant des jets de poussières, de l’eau sous forme de vapeur et des petits « cailloux » jusqu’à quelques centimètres de diamètre sont éjectées de la surface. Plus intéressant, aussi proche du soleil, ces jets ne s’arrêtent même plus sur les faces de la comète qui sont « côté nuit », signe que les couches profondes de 67P sont en plein bouleversement. Impossible donc pour Rosetta de s’approcher autant qu’en novembre et décembre: les instruments de navigation de la sonde ne sont pas prévus pour travailler dans le brouillard sous une grêle de poussières. Les équipes au sol sont donc en pleine réflexion pour trouver le meilleur moyen de s’approcher et de continuer le contact avec Philae (une seconde passe dans la nuit a échoué).
L’une des rares photos prises à la surface de la comète, et la plus célèbre qui présente un pied de Philae. Il est possible que d’autres clichés fassent (enfin) leur apparition!
Crédit ESA/Rosetta/Philae/CIVA
Une excellente perspective
En plus d’envoyer au monde un superbe message sur les capacités techniques des sondes européennes, ce réveil de Philae est une bonne nouvelle: le robot s’est remis en route de lui-même, ce qui veut dire qu’il va probablement resté allumé sauf souci technique majeur… Et à quelques semaines à peine du pic d’activité de la comète, on ne pouvait rêver d’un meilleur témoin de l’activité de 67P: on a un laboratoire sur sa surface! Pour peu que les communications suivent, les perspectives d’utilisation de Philae ouvrent une extraordinaire fenêtre d’opportunité pour observer les évolutions, d’abord par rapport aux mesures de novembre, puis au cours des semaines à venir dans l’activité bouillonnante de Churyumov-Gerasimenko. En dernier lieu, Philae n’était resté actif que 60 heures en novembre… Et en ce temps limité, les études menées ont donné lieu aux premières images de la surface d’une comète, aux conclusions sur l’absence de champ magnétique, aux informations radar de composition du coeur cométaire, aux mesures de la porosité de surface, etc… Imaginez la liste impatiente qui doit se former en ce moment même à Toulouse pour le futur programme de Philae!
Vidéo de la plus probable localisation du robot Philae. On a hate d’entendre de ses nouvelles!
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