[Mars] MarCO s’ajoute à InSight
Nous avons évoqué il y a deux semaines la mission InSight (voir ici) actuellement en phase de tests pour le véhicule assemblé au printemps dans les locaux de Lockheed Martin aux Etats-Unis. La sonde partira pour analyser la planète rouge au début du mois de mars 2016. On a cependant appris très récemment que l’atterrisseur InSight ne sera pas seul à décoller. Deux petits satellites poids plume se joindront à la mission jusqu’à Mars, et forment un objectif secondaire. Baptisée MarCO (Mars Cube One), cette initiative vient du JPL qui veut contourner un effet très désagréable des missions vers Mars: la descente et l’atterrissage à la surface de la planète rouge s’est toujours fait dans un silence angoissant, au point de gagner le surnom des « 7 minutes de Terreur » et qui se prolonge plusieurs heures. Cette fois, grâce aux deux vaisseaux MarCO, les équipes au sol pourront peut-être suivre toute l’opération…
Sur cette vue d’artiste, les deux vaisseaux MarCO retransmettent les signaux de la capsule de l’atterrisseur InSight vers la Terre. Crédit NASA/JPL
7 minutes: quitte ou double
Pour quitter l’attraction de notre planète, les vaisseaux vers Mars sont envoyés à très grande vitesse, ce qui offre de nombreux avantages: une trajectoire directe, une navigation facilitée et surtout, un transfert avec un minimum de six mois de voyage seulement. Par contre, pour que ces mêmes vaisseaux puissent atterrir sur la planète rouge, il faut les freiner. Une partie de cette opération est réalisée avec ce qui reste de carburant pour la capsule de transfert. Pour la vitesse restante, la fine atmosphère de Mars fournit le freinage nécessaire, avant que parachutes et autres dispositifs d’atterrissage ne puissent prendre le relais. Sauf que voilà, c’est physique, le temps que les communications puissent parvenir à la Terre, il faut 15 minutes, aussi lorsque la confirmation (ou le silence) de l’atterrissage est envoyée, le vaisseau est déjà sur Mars, ou mort depuis 7 minutes. Pour Curiosity, on peut imaginer l’inquiétude des équipes avec un projet à plusieurs milliards de dollars en jeu: 7 minutes de Terreur… Et ce n’était que pour la confirmation que le rover avait touché le sol: l’orbiteur qui retransmet les informations vers la Terre ne peut à la fois recevoir les informations depuis le sol et les envoyer vers la Terre en une seule opération! Le check-up initial peut durer plusieurs heures et les premières images envoyées faire patienter les équipes pour des durées déraisonnables.
Lorsque ça fonctionne, il y a de quoi faire de beaux visuels. Dans le cas de l’atterrisseur européen Beagle 2, les 7 minutes s’étaient transformées en plusieurs jours avant que la mission ne soit requalifiée en échec. Crédit NASA/JPL
Superbe vidéo qui explique bien les challenges appliqués à la mission Curiosity. Ce sera un peu plus simple pour InSight (pas besoin du système de grue), nous en reparlerons.
Crédit NASA/JPL
Pour InSight, cependant, les choses pourraient être différentes:
La mission MarCO
MarCO, ce sont deux « gros » CubeSats, qui mesurent 40*25*10cm à leur lancement, avant de déployer panneaux solaires et antennes. Lorsque InSight est envoyée sur Mars, les deux unités MarCo se séparent du lanceur: elles seront au final à plusieurs kilomètres l’une de l’autre. Leur rôle est simple: durant leur courte durée de vie opérationnelle, ces deux sondes vont devoir recevoir les signaux envoyés par InSight d’un côté (en bande UHF), les décoder et les renvoyer vers la Terre (signaux en bande X). Ils ne sont pas lourdement équipés, ne savent rien faire d’autre que transmettre des signaux, se positionner et envoyer des commandes. Pour autant, lorsqu’ils quitteront le dernier étage de la fusée Atlas V, ce seront les premiers CubeSats Interplanétaires! Leur mission a été simplifiée au maximum. Par exemple, ils n’effectueront pas la manoeuvre de freinage pour rentrer dans l’atmosphère de Mars, puisque leur rôle n’est que de transmettre: de ce fait ils n’entreront pas en orbite… La mission MarCO se termine quelques minutes après l’atterrissage, lorsque les deux petits vaisseaux seront déjà trop loin de Mars pour être utiles.
La maquette de l’un des deux MarCO avec ses systèmes déployés, dans les mains de Joel Steinkraus et Farah Alibay, deux ingénieurs au Jet Propulsion Laboratory. Crédit NASA/JPL-Caltech
Il s’agit déjà d’une mission secondaire: InSight peut très bien fonctionner sans les deux unités MarCO pour relayer les signaux à l’atterrissage. Le but ici, c’est de vérifier que ces toutes petites architectures peuvent fonctionner sur du long terme, supporter le voyage interplanétaire et remplir leur mission critique « comme les grands ». Le second objectif est de tester ces nouveaux équipements de communication à deux voies, qui seront en cas de succès sans doute envoyés dans une forme optimisée en 2021-2022 avec le prochain orbiteur-relais de la NASA. D’autre part cela permet d’éviter de monopoliser les moyens existants plusieurs heures sur un seul système: à l’avenir, il sera peut-être généralisé d’emmener ses propres transmetteurs lors d’un voyage interplanétaire.
Changement d’échelle: la maquette à l’échelle 1 de MarCO (avec Farah Alibay) devant la maquette à l’échelle 1/2 du Mars Reconnaissance Orbiter (MRO) lequel fournit des images haute définition de Mars tout en servant de relais de communication vers la Terre pour les Rovers. Crédit NASA/JPL-Caltech
Les beaux jours des CubeSats
Avec leur panneaux et antennes sortis, les deux unités de Marco ressemblent encore aux miniatures que l’on retrouve accrochés sur le stand des grands constructeurs de satellites au salon du Bourget. Pour autant, la mission sera suivie de près par de grands instituts: le Jet Propulsion Laboratory de la NASA, mais aussi les universités du Colorado, de l’Arizona, au Japon et ailleurs. Car les CubeSats interplanétaires ont le vent en poupe, ce sont même les principales innovations des grandes missions à venir. Même lors du lancement de la fusée super-lourde américaine SLS en 2018, onze CubeSats seront déployés, avec pour certains des missions très ambitieuses, comme d’identifier un astéroïde et de le caractériser. Avec l’apparition de CubeSats dédiés à des objectifs ponctuels comme retransmettre des signaux durant la phase de rentrée sur Mars, ou d’observer un impacteur de la glace sur Europe, leur utilisation devrait encore augmenter. Cela traduit aussi un nouveau cap technologique: en dehors des appareils scientifiques imposants à la pointe de la technologie qui sont montés sur les missions principales, les composants électroniques, la propulsion et l’alimentation de micro-vaisseaux est maintenant possible.
Avant la mission InSight en 2016, les tests se poursuivent pour que les systèmes EDL (Entry, Descent and Landing) fonctionnent comme prévu. Ici, la démonstration en soufflante du parachute.
Crédit NASA
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