[ESA] Sentinel-1B est en orbite
Pour le 25è lancement cette année, tout s’est bien passé à Kourou: la fusée Soyouz 2.1A qui emmenait Sentinel-1B, Microscope et trois CubeSats en orbite basse a bien décollé, avant de délivrer ses satellites au cours de manoeuvres qui ont duré environ 4h. C’est le moment de souffler pour les ingénieurs russes et les équipes d’Arianespace: pour ce 14è vol de Soyouz depuis le centre guyanais, le vol avait été retardé à trois reprises: deux pour cause de météo défavorable, et une dernière car une centrale inertielle était défaillante lors du compte à rebours. Pour se transformer, au quatrième soir, en un splendide nouveau succès pour le programme européen.
Toujours aussi belle après bientôt 60ans de versions peu différentes les unes des autres: Soyouz!
Crédit Arianespace/CNES/ESA
Décollage de Soyouz 2.1A
Pour son 16è décollage orbital (toutes nations confondues), la Soyouz 2.1A équipée d’un étage supérieur Fregat se dirigeait donc en orbite basse. Grâce à la météo, les téléspectateurs ont pu assister au décollage et jusqu’à deux minutes de vol complètes du lanceur, ce qui est assez rare: la manoeuvre de séparation des boosters auxiliaires du premier étage (la « croix de Korolev ») était d’ailleurs spectaculaire. Les étapes suivantes, classiques, ont vu l’allumage du second étage, avant la mise en route du véhicule Fregat en version intermédiaire (M) avec plus de 5 tonnes de carburant: ce dernier est rallumable, et il a effectué 4 manoeuvres au cours de la soirée, sans compter sa propre rentrée atmosphérique de façon à ne laisser aucun déchet orbital supplémentaire au cours de la mission.
Les visuels très informatifs d’Arianespace au cours de ses « live » de lancement. Et puis, il y a ce magnifique niveau de Franglais!
Crédit Arianespace TV.
Seulement 23 minutes après avoir quitté la Terre, le satellite Sentinel-1B était séparé avec succès. Puis il a fallu attendre (ou faire sa nuit de sommeil, pour les européens) T +2h48 pour que les trois CubeSats de l’initiative européenne « Fly your satellite » soient à leur tour séparés. A ce moment précis du vol, Fregat avait abaissé son orbite, et ce afin de limiter une fois encore les déchets orbitaux: avec leur périhélie à moins de 460km, ces trois nano-satellites de 10*10*10cm prendront moins de 25 ans pour rentrer dans l’atmosphère terrestre. Enfin, en orbite circulaire à 711km, après 3h et 57 minutes de vol, c’est le satellite expérimental Microscope, imaginé et construit en France, qui est séparé. Tout s’est bien passé. Les équipes d’Arianespace peuvent souffler… Mais pas trop! Le prochain décollage est aussi une Soyouz (2.1B Fregat je crois), qui emmènera deux satellites Galileo en orbite le 24 mai prochain.
Sentinel-1B (ou 1A, puisque ce sont les mêmes). Le satellite entrera prochainement en phase de test et sera commissionné d’ici quelques mois. Crédit Thales Alenia Space/ESA
Les satellites
Comme son nom l’indique, Sentinel-1B fait partie de la grandissante famille Sentinel! C’est le programme européen Copernicus, qui a pour objectif d’observer de façon précise, ouverte à tous et publique, l’état de notre planète. Sentinel 1B est le premier « doublon » de ces satellites qui seront tous mis en oeuvre par paires, afin de couvrir le globe plus rapidement avec leurs instruments. Par exemple les deux Sentinel-1 couvrent l’ensemble de la planète avec leurs radars en moins de 6 jours. Equipés de grands SAR (Synthétic Aperture Radar), ces deux satellites observent la Terre à travers les nuages, et sont exclusivement dédiés à prendre des images du sol. Reliefs, exploitations minières, affaissement des sols, rien ne leur échappe, y compris les calottes glacières, la hauteur des vagues… L’antenne seule mesure 12m de long, sur un vaisseau qui pèse un peu plus de 2,3 tonnes (l’un des plus lourds de la famille Sentinel). Construits les deux par Thales (Sentinel 1A est en orbite depuis 2014), ils ont une durée de vie prévue d’environ 15 ans, ce qui est impressionnant sur ce genre de petites plate-formes.
Première tentative avortée à Kourou, le 22 avril. La junle autour est presque menaçante!
Crédit ESA/Arianespace/CNES
MicroSCOPE est une expérience du CNES. La validation d’un principe lié à la théorie de la Relativité, mais aussi à la simple définition de la gravité telle qu’établie par Newton… Le principe d’équivalence: deux objets de masses identiques se comportent de façon identiques lorsqu’elles sont soumises au même champ gravitationnel. Cette loi lie l’inertie d’un objet avec son champ gravitationnel. Elle a jusqu’à présent pu être testée jusqu’à un ordre de magnitude de 10^-13… Que le petit satellite MicroSCOPE pourrait encore baisser à 10^-15. Inutile de préciser qu’on s’attend très fort à ce que l’expérience marche comme prévu (sinon la théorie sera fausse, il en faudra une autre et j’aimerai vous dire que ça fera du bruit dans la communauté scientifique). Pour le test, deux masses de matériaux différents sont relâchées tandis que le vaisseau autour se calibre pour leur fournir un environnement parfait: pas de perturbations magnétiques, le vide spatial, une orientation maîtrisée… Cela rappelle un peu l’expérience de LISA Pathfinder, mais à une plus petite échelle (MicroSCOPE pèse seulement 330kg) et surtout, en orbite terrestre.
MicroSCOPE en image de synthèse. Crédit CNES/ESA
Enfin, trois CubeSats faisaient partie du voyage, grâce à une initiative européenne « Fly your Satellite », qui s’adressait aux universités des pays engagés dans l’ESA. C’est ainsi que AAUSAT-4 de l’université d’Aalborg a été sélectionné: il embarque un prototype d’AIS (Automatic Identification System) adapté aux navires et aisément déchiffrable. OUFTI-1, de l’université de Liège embarque pour sa part une expérience radio qui teste un nouveau protocole afin de communiquer avec les vaisseaux lointains… Et E-STAR2 de l’université de Turin, qui embarque un équipement capable de mieux retrouver l’orientation du vaisseau et de la contrôler en orbite. Trois CubeSats qui marquent en Europe aussi la volonté de plus utiliser ces superbes petites plate-formes pour des tests et des budgets maîtrisés qui permettent à des universités d’envoyer leur propres vaisseaux en orbite.
Les trois Cubesats, symboliquement aux couleurs de leurs pays de tutelle.
Crédit ESA
Bravo à toutes les équipes impliquées!
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